Phrozen est surtout connu pour ses imprimantes résine, mais la marque s’attaque désormais au marché FDM avec la Arco, une machine de grande dimension accompagnée d’un module multicouleur optionnel. Très attendue, cette imprimante a subi quelques retards avant d’arriver entre les mains des utilisateurs. J’ai pu la tester en profondeur, caisson et Chroma Kit compris, afin d’évaluer ce que propose réellement cette première incursion de Phrozen dans le filament.
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Une machine ambitieuse sur le papier
La Arco est annoncée comme une imprimante rapide, dotée d’une structure rigide inspirée des Voron, avec un volume d’impression généreux de 300 × 300 × 300 mm. Elle fonctionne sous Klipper et Phrozen avance une vitesse maximale de 1000 mm/s, une accélération allant jusqu’à 40 000 mm/s² et un débit élevé. Ce sont des valeurs théoriques qui restent à relativiser, mais elles donnent une idée de la direction prise par le constructeur.
Le châssis, proche d’un design CoreXY type Voron 2.4, utilise un plateau fixe en Z et un portique mobile. Cette approche limite les vibrations verticales et favorise la précision. La buse pouvant atteindre 300 °C et le plateau chauffant permettent d’aborder une bonne variété de matériaux, même si les filaments très techniques restent hors d’atteinte en l’absence de chambre chauffée active.
Phrozen propose également un caisson en option ainsi qu’un module multicouleur, le Chroma Kit. Le positionnement tarifaire reste correct au vu des prestations, même si l’ensemble devient rapidement onéreux lorsqu’on additionne imprimante, caisson et système multimatériaux.
Un montage simple et une construction robuste
L’unboxing dévoile une machine lourde, solide, utilisant de l’acier et des plastiques de bonne qualité. Le montage est réduit au strict minimum : retirer les sécurités, visser le support de bobine, monter les tubes PTFE et effectuer la calibration. L’ensemble rappelle clairement l’assemblage d’une Voron prémontée, jusque dans la logique du passage des courroies.
Seul point discutable : l’écran est fixé à la base, orienté vers le bas, sans possibilité d’inclinaison. Cela complique la lisibilité selon la position de la machine.
L’interface reste simple et fonctionnelle, limitée mais suffisante pour les réglages de base. Le plus gros du travail se fait évidemment sur ordinateur via un slicer.
Un caisson solide, mais sans chauffe active
Le caisson de Phrozen s’installe facilement et surprend par sa robustesse : panneaux en acier, portes en verre trempé, vérins pour l’ouverture supérieure. C’est du sérieux. Il améliore nettement l’isolation phonique, permettant de gagner environ 8 dB porte fermée.
Le point faible reste l’absence de chauffage actif de la chambre. La température interne progresse grâce au plateau, mais cela ne suffit pas pour les matériaux les plus exigeants. Le caisson reste donc un complément utile, mais ne transforme pas la machine en solution professionnelle haute température.
Le Chroma Kit : un système multicouleur efficace mais daté
Le Chroma Kit fonctionne sur le principe des AMS de type Bambu Lab : des moteurs gèrent l’arrivée du filament, les changements s’accompagnent de tours de purge et tout blocage peut interrompre le processus. Phrozen a intégré une idée intéressante : un petit convoyeur magnétique qui évacue automatiquement les résidus de purge hors de la machine.
Le système a également l’avantage de faire office de déshydrateur autonome, même imprimante éteinte.
Néanmoins, les limites inhérentes à cette technologie demeurent : lenteur en multicouleur, pertes de filament, risques de casse ou bourrage. Durant mon test, j’ai rencontré plusieurs blocages nécessitant une intervention manuelle. L’idée fonctionne, mais elle arrive tard sur un marché où les systèmes multi-têtes commencent à s’imposer.
Logiciels : un écosystème encore jeune
Phrozen propose son propre slicer, Pixup FDM, mais celui-ci manque de maturité : interface volumineuse, options limitées, absence de traduction française. Heureusement, une version dédiée d’OrcaSlicer est disponible, bien plus complète et agréable. Elle facilite notamment la gestion des couleurs, même si le mapping final doit se faire sur l’écran de la machine.
Côté firmware, Klipper assure une utilisation fluide et des impressions réactives.
Qualité d’impression : très bonne, sauf pour les filaments extrêmes
Les tests d’impression confirment le potentiel de la Arco.
En PLA, la qualité est excellente, avec des couches propres et une bonne précision dimensionnelle. Le TPU 95A passe sans difficulté, tandis que le TPU très souple (70A) pose problème, le filament se coinçant dans l’extrudeur. Rien d’étonnant pour une machine non spécifiquement pensée pour les matériaux ultra-flexibles.
L’ABS imprimé dans le caisson donne de très bons résultats, stables, sans déformation notable. Pour un usage régulier en ABS, l’ensemble Arco + caisson est parfaitement exploitable.
En revanche, les limites apparaissent avec le polypropylène (PP). Malgré plusieurs tentatives et calibrations, l’imprimante n’a pas réussi à produire une pièce correcte. L’absence de chambre chauffée active semble ici décisive : le matériau refroidit trop vite et perd son adhérence.
Bilan : une très bonne imprimante… mais un module multicouleur perfectible
La conclusion doit se faire en deux temps.
D’un côté, la Arco elle-même : une machine robuste, bien conçue, agréable à utiliser et capable d’excellents résultats. Sa mécanique inspirée des Voron lui confère une stabilité appréciable et un comportement très sain. C’est une imprimante destinée aux passionnés, à ceux qui aiment les machines sérieuses, rigides, avec du potentiel de réglage et d’évolution.
De l’autre, le Chroma Kit multicouleur : un système fonctionnel mais limité, qui aurait brillé il y a deux ans, mais qui semble aujourd’hui déjà dépassé face aux solutions multi-têtes. Il conviendra à ceux qui souhaitent un multicouleur occasionnel et acceptent les purges et les risques de blocage.
Le caisson, quant à lui, est très bien fabriqué, mais n’offre pas les avantages d’une chambre chauffée. Il s’agit d’un accessoire de confort, non d’un module permettant de franchir le pas vers les filaments les plus exigeants.
En résumé
La Phrozen Arco est une excellente surprise. Elle n’a pas la vocation d’être une imprimante “grand public”, mais elle séduira les utilisateurs à la recherche d’une machine sérieuse, stable et efficace sur la plupart des matériaux courants. Elle souffre encore d’un écosystème logiciel jeune et de quelques limites thermiques, mais son potentiel est indéniable.
Pour ceux qui hésitent à l’adopter, tout dépendra de leurs attentes : pour le multicouleur avancé, il faut être conscient des compromis ; pour la mécanique, la stabilité et la qualité d’impression, la Arco s’impose comme une option très intéressante dans sa catégorie.
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